mercredi 28 décembre 2011

Le roi et la reine d'Espagne


Si vous avez lu mes précédents billets, vous avez beaucoup entendu parler d'eux : Marie-Anne d'Autriche et Philippe IV sont les parents de la petite infante Marguerite-Thérèse. Mais vous n'avez pas forcément remarqué qu'ils étaient présents sur le tableau... Pourtant ils sont là, l'un et l'autre :
Le miroir des Ménines

Vous ne les situez pas dans le tableau ?

Le miroir des Ménines

On ne voit que leur reflet dans le miroir au-dessus de l'infante. Lorsque nous regardons les Ménines, nous sommes à la place du roi Philippe IV et de son épouse, la reine Marie-Anne, qui posent pour Velasquez. Soudain, leur fille unique rentre dans la pièce, accompagnée de ses suivantes (les Ménines) et de sa petite cour... Pour nous faire comprendre et imaginer la scène, l'artiste devait nous montrer les souverains d'Espagne qu'il était en train de peindre, et il a utilisé un miroir pour cela (comme l'avait fait avant lui Van Eyck dans son tableau les époux Arnolfini, conservé à la National Gallery de Londres. Je publierai une reproduction de ce tableau plus tard). C'est le seul portrait de Velasquez où le roi et la reine sont représentés ensemble.

Couple assez mal assorti, Philippe IV avait 30 ans de plus que sa nièce, Marie-Anne. Destinée tout d'abord à devenir la femme du fils aîné de Philippe IV, qui mourut prématurément, la jeune archiduchesse épousa donc le père de son fiancé en 1649. Joyeuse et primesautière avant d'arriver à Madrid, elle devint une "Allemande capricieuse et têtue", très imbue d'elle-même et un peu trop attachée son pays natal, l'Autriche. Marie-Anne supporta très mal de devoir vivre enfermée dans la prison dorée de l'étiquette de la cour madrilène. Une prison d'ailleurs moins dorée qu'elle n'aurait pu l'être : au XVIIe siècle, l'Espagne n'a plus ni la gloire, ni le prestige qu'elle avait cent ans auparavant, sous Charles Quint. Elle a perdu les Provinces-Unies (Pays-Bas actuels) et le Portugal, et l'argent provenant des colonies outre-atlantique n'est pas bien investi. Les guerres contre la France ont achevé de ruiner le pays, qui ne sera bientôt plus qu'une puissance de second ordre.
Philippe IV, lui, est un être profondément dépressif. Il étouffe dans le cérémonial pesant de la cour, mais il le respecte à la lettre. Très pieux, ses heures de débauches avec des prostituées sont suivies de crises mystiques et de nuits au pied du crucifix. Sous la tutelle de son favori, le comte-duc Olivarès, il s'en sépara pourtant sous la pression de sa première femme, Elisabeth de France. La mort de celle-ci, suivie, l'année suivante, par celle du fils qu'elle lui avait donné, le brillant infant Baltazar-Carlos, le plongèrent dans une dépression profonde dont il n'émergea jamais totalement.

Hébé

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